RSA : une généralisation de la pauvreté Enregistrer au format PDF

Intervention de Michèle Picard
Mardi 23 juin 2009

Lors des débats que nous avons eus au conseil d’administration du CCAS de Vénissieux, composé d’associations et d’élus en prise et en contact direct avec les populations en difficulté, nous avons étudié de près la question du RSA, voulu par le gouvernement et le haut commissaire aux solidarités actives, Martin Hirsch. Toutes les dimensions du revenu de solidarité active ont fait l’objet de nombreuses discussions, en fonction des éléments distillés au compte-gouttes– il faut bien le dire- par l’exécutif. La première interrogation de taille qui a été soulevée par le CA a porté sur la question des compétences. Il est apparu logique qu’un seul pôle, le Département, soit conforté dans son rôle d’intervenant unique en matière d’aide légale. Encore une fois, l’Etat cherche à se décharger de ses obligations sans transférer de moyens financiers aux collectivités locales pour la mise en œuvre du RSA, notamment pour la phase 1 et 2. Un seul interlocuteur, le Conseil Général donc, paraît plus opportun et cohérent pour une maîtrise complète des dossiers déposés par les habitants, qui seront informés directement au sujet de l’ouverture de leurs droits, de l’étude des requêtes, etc. Mais que les choses soient claires, au sujet du RSA, le hiatus est avant tout d’ordre politique, d’ordre moral ! Dans le conseil d’administration du CCAS, tout le monde, bien évidemment, souhaite favoriser la reprise d’activités pour les populations au RMI ou au chômage, mais pas à n’importe quel prix et ni à n’importe quelle condition, pas en maintenant les gens la tête sous l’eau, pas en institutionnalisant la précarité, la pauvreté ! Le Revenu de Solidarité Active, ça n’est ni plus ni moins que l’instauration d’un nouveau statut : celui du travailleur pauvre ! Il institutionnalise la précarité en maintenant les allocataires proches du seuil de pauvreté. On peut d’ores et déjà affirmer un net recul dans les mois à venir pour les bénéficiaires de feu le RMI et de l’allocation de parent isolé. Le sens et la nature même de l’API sont détournés. A travers un volet répressif et des menaces de sanctions, le RSA sous-entend que le chômage est un choix, indépendant d’une pénurie d’emplois. (1)

On cultive l’idée que les gens ne peuvent pas vivre dignement et décemment de leur emploi, et qu’il faut multiplier les petits boulots, ou recourir à l’accompagnement social. Sur fond de crise, il renforce la précarité, met à mal le CDI, que la droite a dans le collimateur depuis le rapport Larcher de 2005. Enfin, c’est à nouveau un cadeau sans pareil du gouvernement Sarkozy-Fillon au Medef de Madame Parisot ! Avec le RSA, les travailleurs sont sous pression, sommés d’accepter les petits boulots, les emplois précaires sans avenir, c’est une main d’œuvre corvéable, jetable et, qui plus est, « sanctionnable » ! Les bas salaires deviennent la norme, acté par le RSA ! D’après les premiers bilans tirés depuis sa mise en place dans les départements d’expérimentation, seulement 3,38% des allocataires ont retrouvé une activité, mais dans le même temps le recours à des emplois à temps très partiels a augmenté de 15% ! Le revenu de solidarité active, c’est le traçage des pauvres, exploités sans vergogne ! A l’heure où le gouvernement utilise à des fins de pure communication le mot Grenelle, il ferait mieux de mettre en place une véritable politique de l’emploi, il ferait mieux de mettre en place un vrai Grenelle des salaires, il ferait mieux d’orienter le plan de relance vers le pouvoir d’achat et le soutien à la consommation. Au contraire, il ne cesse de multiplier des mesures en forme de leurres, destinées à faire croire qu’il s’occupe de la pauvreté alors qu’il ne fait qu’aggraver la situation. Depuis qu’il a été élu, Nicolas Sarkozy a distribué de nombreux cadeaux au CAC 40 et aux ménages favorisés. Le bouclier fiscal, c’est 14 milliards d’euros pour 15 000 foyers fiscaux privilégiés. En 2008, cela a coûté 458 millions d’euros en non-rentrées dans les caisses de l’Etat ! En clair, le RSA étant financé par les contribuables, les un peu moins pauvres payent pour les pauvres, la grande majorité des français se serre la ceinture tandis qu’une minorité de privilégiés continuent de vivre dans l’opulence. A cette politique, on peut ajouter les milliards d’euros injectés sans contreparties aux banquiers, aux donneurs d’ordre, les fonds stratégiques accordés aux constructeurs automobiles qui en profitent pour licencier avec les fonds publics (3000 emplois sont détruits par jour en France), et nous annoncer le plus faible des plans de relance des pays de l’union européenne, en pleine crise mondiale ! C’est la raison pour laquelle le conseil d’administration du CCAS s’est opposé vivement au principe et à l’esprit du RSA.

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